dimanche 10 août 2008

Promenade à Sion - 10


Gérard est là. Ses yeux brillent de la fierté simple d’avoir partagé la visite. Nous nous serrons la main sous les deux minuscules croix de Lorraine de l’imposte peinte. Il me parle. Je m’éloigne. Il me salue encore de la main levée. Je pousse le portail du cimetière. Il a refermé l’église et file dans la rue de la mairie. Un vol de pigeons s’abat sur le clocher. Je contourne la tombe des Oblats, passe sous le grand pin, marche droit vers la tombe de l’artiste… Victor Guillaume. Elle est là, de terre nue, marquée d’un buis contre le mur et d’une croix de Lorraine en pierre grossièrement taillée, presque brute encore, comme si l’homme qui repose là avait voulu dire que, malgré sa communion de peintre avec l’univers et son travail de chaque jour, sa pierre personnelle restait encore à polir ! Trois mots, deux dates : Victor Guillaume peintre 1880-1942. On a dit de lui, le comparant à Cézanne, qu’il avait trouvé en Sion-Vaudémont « sa montagne Sainte-Victoire ». Pourquoi vouloir comparer les incomparables et faire d’un suivant un suiveur ? L’un a été le témoin émerveillé d’une montagne blanche à la cime déserte que les lumières du midi rhabillent sans cesse de pastels changeants… l’autre a raconté sur la toile avec sa rude affection de paysan du Saintois notre Colline couronnée d’histoire et son intime relation à l’homme depuis des millénaires ! Si l’un a consacré sa vie au paraître de Provence… l’autre a voué son travail à l’être de Lorraine ! Et les deux, ensemble, ont célébré la grandeur de l’âme humaine ! À deux pas de Guillaume, au plus éloigné d’une tombe de député couverte d’arguments électoraux qui leur tourne le dos, à l’endroit précis où Léopold Baillard aurait passé la nuit (il fuyait la maréchaussée après la messe clandestine dans la grange du Pierre Mayeur), marquée d’une croix de Lorraine en fer, une autre tombe simple, une dalle gravée d’une épitaphe tirée de Maurice Barrès « Au pays de la Moselle… », et un nom Jules-Antoine Flauder. Je ne connais pas cet homme inhumé là en 1972, mais je le trouve… beau ! Il a sa juste place dans ce cimetière conservatoire aux allures de verger où, parmi les humbles morts de chez nous, j’aime aller respirer les effluves vitaux de notre terre.

A suivre
GL
références édition voir billets précédents
image Automne dans le ciel de Sion 10/07 photo GL

6 commentaires:

Magali a dit…

Que de jolies photos de notre région, Merci :-)

Gilles LAPORTE a dit…

Merci, Magali, pour votre visite et vos mots chaleureux.
La découverte de votre art m'a procuré un vif plaisir.
A bientôt.
Cordialement.
Gilles

Anonyme a dit…

Je n'attendais pas moin de votre sensibilité. Vous écrivez bien ce que je pense chaque fois que je monte LA HAUT. Jean Castelli

Anonyme a dit…

Juste un oeil sur ton site
Je te souhaite beaucoup de bonheur
Colette

Gilles LAPORTE a dit…

Merci Colette,
"Les quatre vents" ont beau tenter chaque jour d'écarteler la mémoire, l'essentiel demeure : la Lumière de la rencontre et de l'infini partage.
Paix et bonheur à toi.
Gilles

Anonyme a dit…

Je n'ai pas d'ordinateur personnel. J'aurai aimé entendre ta voix.
Colette