dimanche 31 janvier 2010

Pompidou... arbre et démocratie !

Il nous écrit d'un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître...
Un temps de moindre agitation présidentielle, d'"humanités enseignées" dans les écoles, de vrais artistes dans les palais nationaux, de justice soucieuse de présomption d'innocence...
Un temps sans bouclier fiscal, de plus grand respect de l'autre, toutes conditions confondues, de l'autre et... de la vie sous toutes ses formes, y compris... végétale !
Mais, en ce temps-là, le Président était... poète !

Lettre du Président Georges Pompidou

au Premier Ministre (M. Chaban-Delmas)
17 juillet 1970

Mon cher Premier Ministre,
J'ai eu par le plus grand des hasards, communication d'une circulaire du Ministre de l'Equipement -Direction des Routes et de la Circulation Routière- dont je vous fais parvenir photocopie.
Cette circulaire, présentée comme un projet, a en fait déjà été communiquée à de nombreux fonctionnaires chargés de son application, puisque c'est par l'un d'eux que j'en ai appris l'existence.
Elle appelle de ma part deux réflexions : la première, c'est qu'alors que le Conseil des Ministres est parfois saisi de questions mineures telles que l'augmentation d'une indemnité versée à quelques fonctionnaires, des décisions importantes sont prises par les services centraux d'un Ministère en dehors de tout contrôle gouvernemental ; la seconde, c'est que, bien que j'aie plusieurs fois exprimé en Conseil des Ministres ma volonté de sauvegarder "partout" les arbres, cette circulaire témoigne de la plus profonde indifférence à l'égard des souhaits du Président de la République. Il en ressort, en effet, que l'abattage des arbres le long des routes deviendra systématique sous prétexte de sécurité. Il est à noter par contre que l'on n'envisage qu'avec beaucoup de prudence et à titre de simple étude, le déplacement des poteaux électriques ou télégraphiques. C'est que là il y a des Administrations pour se défendre. Les arbres, eux, n'ont, semble-t-il, d'autres défenseurs que moi-même et il apparaît que cela ne compte pas.
La France n'est pas faite uniquement pour permettre aux Français de circuler en voiture, et, quelle que soit l'importance des problèmes de sécurité routière, cela ne doit pas aboutir à défigurer son paysage. D'ailleurs, une diminution durable des accidents de la circulation ne pourra résulter que de l'éducation des conducteurs, de l'instauration des règles simples et adaptées à la configuration de la route, alors que complication est recherchée comme à plaisir dans la signalisation sous toutes ses formes. Elle résultera également des règles moins lâches en matière d'alcoolémie, et je regrette à cet égard que le gouvernement se soit écarté de la position initialement retenue.
La sauvegarde des arbres plantés au bord des routes -et je pense en particulier aux magnifiques routes du Midi bordées de platanes- est essentielle pour la beauté de notre pays, pour la protection de la nature, pour la sauvegarde d'un milieu humain.
Je vous demande donc de faire rapporter la circulaire des Ponts et Chaussées, et de donner des instructions précises au Ministre de l'Equipement pour que, sous divers prétextes (vieillissement des arbres, demandes de municipalités circonvenues et fermées à tout souci d'esthétique, problèmes financiers que posent l'entretien des arbres et l'abattage des branches mortes), on ne poursuive pas dans la pratique ce qui n'aurait été abandonné que dans le principe et pour me donner satisfaction d'apparence.
La vie moderne dans son cadre de béton, de bitume et de néon créera de plus en plus chez tous un besoin d'évasion, de nature et de beauté. L'autoroute sera utilisée pour les transports qui n'ont d'autre objet que la rapidité. La route, elle, doit redevenir pour l'automobiliste de la fin du vingtième siècle ce qu'était le chemin pour le piéton ou le cavalier : un itinéraire que l'on emprunte sans se hâter, en en profitant pour voir la France. Que l'on se garde de détruire systématiquement ce qui en fait la beauté !

Cette lettre "d'Outre-tombe" a été lue, ce dimanche matin, 31 janvier, sur France Inter, par Alain Baraton, le jardinier de Versailles, en compagnie du journaliste exemplaire Stéphane Paoli. Merci à eux de nous l'avoir rappelée, en ces temps d'amputation de la mémoire ! On peut, bien sûr, (on devrait...) la faire circuler le plus largement possible !

Salut, Président, et... Fraternité !

Images Arbres en Lorraine photos copyright GL

mercredi 27 janvier 2010

Vaincre la faim... François Guillaume

Vaincre la faim !
Tel est le titre du nouveau livre que vient de publier François Guillaume, paysan, ancien président de la FNSEA (Fédération Nationale des Syndicats d’Exploitants Agricoles), ancien député, parlementaire européen et Ministre de l’agriculture. Un livre en forme de terrible constat, certes, mais défricheur de pistes porteuses d’espoir ! À condition que le tout-libéral ne s’impose pas davantage au monde, que la loi anglo-saxonne du sacro-saint profit ne mette pas la planète en coupe réglée, et que les hommes prennent conscience de leur devoir de… respect de l’autre !
Quelques extraits édifiants :

« En 1988, suite à leur rencontre avec Sœur Emmanuelle, la protectrice des chiffonniers du Caire, ils (les producteurs de lait) étaient effectivement prêts à accroître leur production pour livrer gratuitement en Egypte ce supplément indispensable aux dispensaires et aux écoles de la Congrégation religieuse animés par cette Sœur mondialement connue. Ce don exemplaire aurait pu s’étendre ensuite à d’autres pays du monde. Il avait, en outre, l’avantage de ne pas porter atteinte à la maîtrise des quantités commercialisées. Néanmoins, les autorités communautaires s’y opposèrent. »
(…)
« En 1996, l’Union Européenne connaissait un nouvel excédent de viande bovine après tant d’autres. Faute de l’avoir prévu et d’avoir à temps recherché des débouchés, les eurocrates prirent une mesure d’abattage et d’incinération, dès la naissance, des veaux mâles nés dans les élevages laitiers moyennant une prime de 122 euros à l’éleveur, ce qui, à terme, avait évidemment une incidence sur le volume de viande produit. En France, en trois ans, 600 000 veaux furent ainsi euthanasiés au titre du programme Hérode ainsi identifié par le Commission européenne, qui s’ingénie à chercher dans l’Histoire ou dans la mythologie grecque et latine des acronymes évocateurs pour personnaliser ses politiques (Erasmus, Poseïdon…). Mais quel est donc, au Berlémont -ce Parnasse européen sans âme-, le technocrate à l’imagination perverse qui a osé baptiser « Hérode » ce sacrifice des veaux en référence au massacre des innocents perpétré, selon les Evangiles, par le roi de Judée pour éliminer avec plus de certitude Jésus, le Messie annoncé ? Et comment le collège des commissaires a-t-il pu adopter cette ignoble proposition ? Pourtant, aucune voix professionnelle, aucune voix politique ne s’est élevée pour dénoncer ce péché contre l’esprit. »
(…)
« En 2000, rien qu’en France, 55000 tonnes de carcasses de bovins ont été sorties des congélateurs pour être incinérées dans le but de dégager les marchés encombrés et de faire remonter les cours. Les autorités européennes avaient estimé que c’était la méthode la moins coûteuse pour faire disparaître cet excédent. Après dénaturation pour décourager les fraudeurs, ces viandes ont été transformées en farines qui, elles-mêmes, après un stockage onéreux, ont été détruites.
Quand on calcule le coût de ces opérations en cascade et qu’on le compare à celui d’une livraison gratuite en Afrique (…) il n’est pas certain que la différence eut été en faveur de la solution retenue par les technocrates de Bruxelles. »


Alors que dans le même temps, notre planète est passée de 850 millions de mal-nourris en 1970 à… 1 020 millions en 2009 !

François Guillaume était l’invité de notre dîner littéraire Plumes et Saveurs que j’animais à l’hôtel-restaurant L’Orée du Bois à Vittel, samedi dernier. Il en a ému plus d’une et plus d’un ! Soirée dense, moments forts de réflexion ! Oubliant le politique qu'il est toujours, le paysan Guillaume, président du Plan qui porte son nom (destiné à agir dans les pays du « tiers-monde »), à laissé la bride sur le cou à sa colère, à sa générosité, à son engagement total en faveur des victimes d’une société avide et injuste : la nôtre.
Vaincre la faim
(éditions Eyrolles)…
A lire absolument !

Tous les droits d’auteur de ce livre sont directement versés à cette association «Plan Guillaume » qui lutte contre la faim depuis 20 ans.
image François Guillaume et GL photo Eric Nurdin Vosges Matin

vendredi 22 janvier 2010

Le temps... Le lac !

Le temps file plus vite que l'ombre des aiguilles sur le cadran de l'horloge !
Alors... en attendant sa pause :
Ainsi, toujours poussés vers de nouveaux rivages,
Dans la nuit éternelle emportés sans retour,
Ne pourrons-nous jamais sur l'océan des âges
Jeter l'ancre un seul jour ?
Ô lac ! l'année à peine a fini sa carrière,
Et près des flots chéris qu'elle devait revoir,
Regarde ! je viens seul m'asseoir sur cette pierre
Où tu la vis s'asseoir !
Tu mugissais ainsi sous ces roches profondes,
Ainsi tu te brisais sur leurs flancs déchirés,
Ainsi le vent jetait l'écume de tes ondes
Sur ses pieds adorés.
Un soir, t'en souvient-il ? nous voguions en silence ;
On n'entendait au loin, sur l'onde et sous les cieux,
Que le bruit des rameurs qui frappaient en cadence
Tes flots harmonieux.
Tout à coup des accents inconnus à la terre
Du rivage charmé frappèrent les échos ;
Le flot fut attentif, et la voix qui m'est chère
Laissa tomber ces mots :
" Ô temps ! suspends ton vol, et vous, heures propices !
Suspendez votre cours :
Laissez-nous savourer les rapides délices
Des plus beaux de nos jours !"
Assez de malheureux ici-bas vous implorent,
Coulez, coulez pour eux ;
Prenez avec leurs jours les soins qui les dévorent ;
Oubliez les heureux."
Mais je demande en vain quelques moments encore,
Le temps m'échappe et fuit ;
Je dis à cette nuit : Sois plus lente ; et l'aurore
Va dissiper la nuit."
Aimons donc, aimons donc ! de l'heure fugitive,
Hâtons-nous, jouissons !
L'homme n'a point de port, le temps n'a point de rive ;
Il coule, et nous passons !
"Temps jaloux, se peut-il que ces moments d'ivresse,
Où l'amour à longs flots nous verse le bonheur,
S'envolent loin de nous de la même vitesse
Que les jours de malheur ?
Eh quoi ! n'en pourrons-nous fixer au moins la trace ?
Quoi ! passés pour jamais ! quoi ! tout entiers perdus !
Ce temps qui les donna, ce temps qui les efface,
Ne nous les rendra plus !
Éternité, néant, passé, sombres abîmes,
Que faites-vous des jours que vous engloutissez ?
Parlez : nous rendrez-vous ces extases sublimes
Que vous nous ravissez ?
Ô lac ! rochers muets ! grottes ! forêt obscure !
Vous, que le temps épargne ou qu'il peut rajeunir,
Gardez de cette nuit, gardez, belle nature,
Au moins le souvenir !
Qu'il soit dans ton repos, qu'il soit dans tes orages,
Beau lac, et dans l'aspect de tes riants coteaux,
Et dans ces noirs sapins, et dans ces rocs sauvages
Qui pendent sur tes eaux.
Qu'il soit dans le zéphyr qui frémit et qui passe,
Dans les bruits de tes bords par tes bords répétés,
Dans l'astre au front d'argent qui blanchit ta surface
De ses molles clartés.
Que le vent qui gémit, le roseau qui soupire,
Que les parfums légers de ton air embaumé,
Que tout ce qu'on entend, l'on voit ou l'on respire,
Tout dise : Ils ont aimé !

Alphonse de Lamartine Le lac extrait de Les Méditations poétiques

lundi 18 janvier 2010

Haïti... Etats-Unis

Les hommes passent… le crime reste !

En arrivant sur les lieux du tsunami qui avait si cruellement frappé le sud-est asiatique voilà quelques temps, la Secrétaire d’Etat états-unienne Condoleezza Rice avait déclaré avec un aplomb naturel proche de la provocation que cette catastrophe était une « belle opportunité pour l’économie américaine ». Nul n’avait bronché devant G.W Bush. Tous avaient mis leur honneur dans la poche et… laissé faire les prétendus sauveteurs du monde.
Bush est parti, en retraite dorée et recherche de marché à travers le monde pour ses conférences de quatre sous. Obama est arrivé, grand, rayonnant, prometteur, séduisant, enjoué, porteur (selon les courtisans naïfs de tous les régimes) des espoirs les plus fous pour la planète, aussi bien pour remplacer la guerre par la paix, la pollution massive (spécialité de son pays) par la propreté absolue, la corruption généralisée par un code moral appliqué d’abord aux magouilleurs de la finance, ensuite au peuple tout entier, l’exploitation et la torture par le respect de l’autre.
Cette fois, c’est Haïti qui est victime d’un tremblement de terre terrifiant, l’un des plus violents des deux derniers siècles.
Et la nouvelle Secrétaire d’Etat états-unienne, Hilary Clinton, épouse d’un passé-Président, de se précipiter sur place pour ouvrir la voie aux troupes d’occupation de son pays, et leur permettre de s’installer efficacement et durablement sur la terre la plus secouée de notre temps, tant par les colères du sous-sol, que par la misère ! Stratégie absolue décidée par Obama et ses complices :ouvrir la voie de Haïti à sa seule armée, interdire aux équipes internationales l’accès aux victimes et ruines, refuser aux secours venus d’ailleurs les moyens d’intervenir (témoin cet avion porteur d’un hôpital de campagne français et ses équipes de médecins-infirmiers interdit d’atterrissage à Port-au-Prince, obligé d’aller se poser à Saint-Domingue). Des milliers de blessés auraient pu être soignés plus tôt, pourraient l’être encore, mieux, sauvés dans bien des cas… Peu importe ! La grandeur des Etats-Unis d’abord et leur mainmise sur les richesses des pays pauvres. Les malheureux ont dû attendre le bon vouloir des conquérants du monde pour… mourir dans les bras de médecins impuissants contre la volonté de domination de ceux qui se prétendent l’exemple universel.
Madame Clinton ne l’a pas dit. Mais elle a certainement pensé comme sa prédécesseure, exécutrice des basses œuvres de Bush : « Cette catastrophe est une aubaine pour les Etats-Unis ».
Ils vont étancher la soif avec Coca-Cola, calmer la faim avec Mad-Donald, porter en terre les cadavres au moyen de camions Ford, reconstruire avec… et ajouter une nouvelle étoile à leur bannière.
À toutes et tous que la misère insupporte, que la douleur crucifie, que la détresse de l’autre fait souffrir… à toutes et tous, secouristes, médecins, pompiers spécialisés dans la recherche de blessés sous les décombres, infirmiers bénévoles et associés de tous les pays… cassez-vous ! Circulez… y’a rien à voir !
Après l’Irak hier, l’Afghanistan aujourd’hui, l’Iran demain… un nouveau marché est né pour les marchands de la bannière étoilée !
Gloire aux Etats-Unis d’Amérique et à leur Président Obama !

Les temps, les femmes et les hommes changent… le crime reste !

Image Haïti AFP Lisandro Suero

vendredi 15 janvier 2010

Faux débats... vraie résistance !

Entre les vrais-faux débats télévisés financés par notre redevance, et la résistance d'un homme, spectaculaire certes, mais de nature à réouvrir les consciences... réfléchissons calmement :
La politique paraît plutôt un cas qu'on ne peut assimiler à celui des autres sciences ou capacités. Ailleurs en effet, ce sont les mêmes personnes visiblement qui transmettent à d'autres leurs capacités et qui tirent d'elles leurs activités ; pensons aux médecins ou aux peintres. Les affaires politiques en revanche, ce sont les sophistes, qui se vantent de les enseigner, alors qu'aucun d'eux n'y est actif, mais elles sont aux mains de ceux qui font de la politique, lesquels, semblerait-il, exécutent cette tâche en vertu d'une certaine capacité, c'est-à-dire empiriquement, plutôt qu'en se servant de l'intelligence !

Aristote Ethique à Nicomaque, Appendice Le Monde de la philosophie-Flammarion p. 420

L'action philosophique doit aujourd'hui l'emporter sur l'action politique proprement dite, dans toute l'étendue de l'Europe occidentale, maintenant en travail plus ou moins explicite de rénovation sociale.
Auguste Comte Lettre à J. Start Mill 17 janvier 1842

mardi 12 janvier 2010

Kremlin-Bicêtre et... karcher !

Le crime est toujours inacceptable, au Kremlin-Bicêtre, à Épinal ou à Romorantin, quelle que soit la victime (lycéen, adolescente désirable, vieille dame riche, ou otage d’une faction), quel que soit le criminel (jeune, vieux, voleur ou violeur, militant d’une cause même honorable). Parce que la vie est sacrée et que nul n’a le droit de disposer de celle d’autrui. Prendre la vie de l’autre, pour quelque cause que ce soit, est toujours la pire abjection.
Mais la nature humaine est ainsi faite que nul ne pourra jamais empêcher un individu, déséquilibré d’origine ou de circonstances, de passer à l’acte agressif, voire criminel. Et notre société aura beau jérémiader, invectiver, organiser des marches blanches ou de couleur, condamner, pleurer de douleur ou d’impuissance, elle devra toujours faire face à des comportements incontrôlables d’humains en marche vers le crime.
Le physicien Gauss a bien mis en évidence cette loi universelle, symbolisée par sa courbe de probabilités en forme de chapeau de gendarme : un neuvième de nos contemporains est d’une nature violente capable sûrement d’aller jusqu’au meurtre. Deux neuvièmes de celles et ceux que nous croisons tous les jours vivent un équilibre tellement fragile qu’ils peuvent, peut-être, aller jusque là, eux aussi. Soit au total un tiers de la population ! Quant aux autres, s’ils sont assez solides, intellectuellement et moralement référencés pour ne pas présenter ce risque, ils ne sont pas à l’abri d’un coup de folie. Nul n’en est à l’abri !
Toutes les harangues politiques n’y changeront rien ! Tous les systèmes de prétendue protection -fouilles systématiques, portiques de sécurité, renforcement des forces de police, fichiers- n’y pourront rien ! Celle ou celui qui voudra agresser, qui porte cette pulsion en lui, pourra toujours le faire, parfois même à son insu, à l’école, au bal, à l’église, à la tête d’une entreprise en ignorant les règles de sécurité, ou sur l’autoroute en fonçant à deux cents à l’heure entre des automobilistes paisibles.
Mais est aussi inacceptable le crime qui s’appuie sur le crime, notamment la pratique du pouvoir par la manipulation, par la menace et par la terreur.
Saisir l’occasion d’un meurtre pour développer une stratégie politique relève d’une perversion aussi grave que celle qui a conduit au meurtre lui-même ! C’est, brandissant une arme présentée au peuple comme infaillible et destructrice, accepter la logique du criminel. C’est, voulant pendre l’adversaire au «croc de boucher » ou « nettoyer la violence -ou la banlieue- au karcher ! », ajouter la violence à une violence déjà si tragiquement présente. Ne vaudrait-il pas mieux s’attaquer réellement à la précarité si traumatisante, à la misère si révoltante, aux injustices si criantes, à l’inculture si galopante, à l’exploitation du citoyen de base, consommateur et travailleur aux mains nues, si insupportable ? Ne vaudrait-il pas mieux donner des repères, donc des éléments d’équilibre, des points d’appui à celles et ceux qui les ont perdus, ou n’ont jamais eu le bonheur d’en recevoir en cadeaux de vie ?
Mais se fixer de tels objectifs suppose de se mettre effectivement au travail au service de tous plutôt que d’une minorité, de ne pas affaiblir le système éducatif en supprimant des postes de maîtres ou des matières si éminemment riches en moyens de connaissance de soi comme l’histoire ou la philosophie, de ne pas soumettre l’Université aux lois du marché dit « libéral », de maintenir voire développer un service public capable de garantir à tous les citoyens de la République d’égales chances d’autonomie, de digne existence, suppose aussi de chercher de vraies solutions aux problèmes plutôt que de les entretenir soigneusement à des fins purement électorales, suppose donc de faire passer l’intérêt général avant les intérêts particuliers des puissants de la fortune, du suffrage universel ou de la nomination, suppose d’appliquer enfin les préceptes révolutionnaires défendus toute sa vie par un homme comme… Philippe Séguin !
Trouverons-nous un jour celles et ceux capables d’agir effectivement pour le mieux être de tous plutôt que de parler de « casquette à l’envers » ou de… « karcher » ?
Trouverons-nous ?
Et si, pour éradiquer la violence, nous passions… la politique au karcher ?

Images Création du Monde Michel Ange chapelle Sixtine - affiche film E.T.

lundi 11 janvier 2010

Séguin-Montaigne... Mort et Liberté !

Il est incertain où la mort nous attende, attendons-la partout. La préméditation de la mort est préméditation de la liberté.
Montaigne Essais I, 20
image portrait de Philippe Séguin Olivier LABAN-MATTEI AFP

samedi 9 janvier 2010

DUBAÏ... tour de cochon !

Que cherche donc à pénétrer ce phallus géant érigé par les Dubaïotes sur les sables de leur désert ? Le vagin cosmique d’où aurait surgit l’humanité ? La conscience mercantilo-libérale universelle ? Le pot d’échappement d’une soucoupe volante qu’il aurait pris pour l’orifice sacré de l’amère mère ? Les réseaux financiers internationaux à ensemencer dans l’espoir d’une plantureuse récolte ? Le trou pétant de l’Histoire pour commémorer les pratiques de la proche Sodome ? La brèche brûlante de la dette publique vautrée sous les palmes du Phoenix aquatique ? L’imaginaire de mâles défaillants en rupture de viagra ? Les ambitions pulpeuses de petits hommes dits « d’État » qui rêvent d’être grands ? La fille-misère qu’il voudrait engrosser pour qu’elle mette bas des foules d’esclaves neufs ? L’entrecuisse accueillant de louves avides des bons morceaux du pouvoir ? Ou la grande ignorance des peuples du monde pour les maintenir en posture d’adoration de Sa Grandeur afin qu’ils demeurent dociles et bien-consommants ?
Que cherche à empaler ce pieu géant planté comme un totem dans les dunes soyeuses de la propagande libérale ?
L’âme de l’humanité ?
C’est fait !
Ces gens-là auraient-ils oublié… Babel ?

image : Bruegel Pieter La Petite tour de Babel vers 1563 Museum Boymans-van-Beuningen Rotterdam photo art.mygalerie

jeudi 7 janvier 2010

Philippe SEGUIN... foudroyé !

Philippe Séguin est mort.
Ce matin. Foudroyé par une crise cardiaque. Il n’avait pas soixante-sept ans.
Il était un pilier solide de notre République, l’un des derniers. Le dernier ?
Il me faisait l’honneur de me compter parmi ses amis.
Hier, à Épinal, où il m’avait confié l’animation de ses réunions publiques, nous avions partagé les heures chaudes de ses campagnes municipales et législatives.
Puis, il s’était offert sans réserve à mes micros, répondant à mes questions, toutes mes questions, dans les studios de radio et de télévision. Son extrême sensibilité m’avait frappé, sa pudeur aussi, et l’émotion toujours à fleur de peau.
Je me souviens de ses larmes vite écrasées, à l’évocation de sa mère aimée, et de son père exemplaire qu’il n’avait pas connu, tombé sous les rafales nazies pour la libération de la France.
Je me souviens de son enthousiasme pour la défense de la trinité républicaine Liberté-Égalité-Fraternité, de ses colères contre tous ceux de tous les camps qui osaient y toucher pour la salir.
Je me souviens de son humanisme, de sa générosité, de son dévouement au service de ses contemporains, de sa fidélité, de sa vision pour notre pays, pour l’Europe, pour… bien plus loin encore !
Je me souviens d’avoir déplacé ma table familiale pour lui permettre d’y asseoir à son aise sa rondeur de bon vivant.
Je me souviens de quelques verres levés avec lui dans les vestiaires du stade avec ses amis footeux.
Je me souviens de l’une de ses étreintes fraternelles, un soir, dans le hall d’accueil de la mairie d’Epinal. Soir d’hiver. Présentation de l’un de mes livres sur le pays qu’il avait préfacé. En retard. Il arrive. Je disparais dans les plis de son manteau. Il me glisse « Si tu savais comme le pouvoir est fatiguant ! » Le regardant droit dans les yeux, je lui réponds « Peut-être ! Mais… que c’est bon ! N'est-ce pas ? » Nos rires complices avaient alors étonné les invités à notre petite fête autour des images et des mots.
Maire, député, ministre, président de l’Assemblée nationale, premier président de la Cour des Comptes, ami, l’homme était beau et vrai, droit dans ses convictions républicaines, imperméable à la flagornerie qui ravit tellement les petits.
Grand, conscient et visionnaire, simple et spontané, chaleureux, d’une honnêteté rare, être de qualité dans une société menée par le paraître… tel était, pour moi, Philippe Séguin.
Je me souviens... cher Philippe ! Je me souviens.
Dans ma vie d’homme, de citoyen, d’écrivain, je me souviendrai toujours de vous.
À Dieu, l’Ami !

image portrait de philippe Séguin Jacky Naegelen - Reuteurs

mercredi 6 janvier 2010

LHASA DE SELA...

Une voix... une âme... une Lumière !

On peut encore la voir, l'entendre surtout, dans les fils si ténus de notre toile... là seulement ! D'invisibles ennemis l'ont détruite. C'est désormais... Marée basse ! Salut Lhasa ! Salut l'artiste ! Salut... la FEMME !

image portrait de Lhasa de Sela photo Ivanoh Demers Archives de la presse

Délassement : Katia Ferré-F. Allard L'Ollivier

Très heureuse surprise, hier au soir !
Katia Ferré, poète, photographe et peintre de Pau, me téléphone : dans les pages de ce blog, elle vient de retrouver la belle oeuvre du peintre Fernand Allard L'Ollivier "Le Délassement" (présentée voilà quelques jours) qui la touche beaucoup.
En 2003, pour "Le Printemps des poètes", à la demande du remarquable Musée des Beaux-Arts de Pau, elle avait écrit une poésie inspirée de cette peinture, et se propose de me l'adresser. Me l'adresse...
Quelle justesse de ton ! Quelle sensualité ! Quelles perspectives nouvelles, ouvertes par ces mots, dans l'oeuvre de ce beau peintre trop ignoré !
Mais... silence ! Je m'efface...
Avec son autorisation, la voici :
Il lui a promis l’extase.
Adèle attend.
Son corps tout en courbes charnues, enrobé de féminité vigoureuse se languit doucement.
Derrière les paupières bleuies d’artifice, qu’imagine-t-elle, pour que tout à coup sa lèvre fardée esquisse un sourire…
Adèle attend. L’instant laisse son corps tranquille enivré seulement par une indolente et suave mélodie.
Il lui a dit : « je veux te contempler frémissante…respirer sur ta gorge le parfum des roses »…
Lasse, elle n’y croit plus tant elle sait le désir inconstant.
Dans la coupe, les fruits exhalent, déjà, la mélancolie de l’automne.
Lui, joue, enfermé dans son désir profond, les yeux clos.L’Hidalgo ne badine pas avec l’amour.
Soudain, une note ! la seule qui donne corps au désir !
L’archet glisse sur la corde, vibre d’émotion, invente des voluptés. La musique se fait houle et soupirs, s’emplit de lutte, s’étire et dépose sur le corps d’Adèle le long frisson velouté qu’elle attendait.
Un son exquis, comme une haleine tiède et douce, glisse et sinue de la gorge aux hanches, caresse les contours, effleure le visage.
Soudain le violon arrache à l’air moite une vibrante sonorité !
Les hanches de la belle incrédule et les flancs du violon se balancent à l’unisson.
Dans un évanouissement musical, la Fleur d’Or offre ses pétales. Le divin nectar coule comme un cristal d’opale et l’archet fait jaillir de l’ardente volute l’adagio en ré du Stradivarius de Crémone.

Katia Ferré
Merci, chère Katia !
image Le Délassement F. Allard L'Ollivier 1929 Musée de Pau photo GL

dimanche 3 janvier 2010

DAKAR d'AMERIQUE !

Ils ont recommencé !
Avec le même acharnement qu’autrefois, la même folie, la même désinvolture devant la misère, voire la mort de l’autre !
Seule la cour de récréation de ces post-adolescents-sandwichs désoeuvrés a changé. Après les dunes et savane africaines, ce sont l’Argentine et le Chili qui ont le prestigieux privilège de recevoir les individus parmi les plus fondus de la planète : pampa, désert d’Atacama, montagnes et défilés de la Cordillère des Andes ont la chance de se voir traversés par le cortège le plus imbécile d’Européens (et de quelques ailleurs) les plus nantis couverts des marques les plus pollueuses de notre temps. Et de recevoir, en ce début d’année promise (paraît-il) au respect de l’environnement, le cadeau somptueux des plus beaux nuages d’oxyde de carbone, et les plus durables agressions que des humains prétendus modernes puissent offrir à la faune, à la flore, et à l’atmosphère de ces pays séduits par le pactole publicitaire.
Le Dakar d’Amérique 2010 est en route vers son plus remarquable record de mépris de la planète et de… la vie d’autrui !

La preuve : dès la première étape, il a fait éclater la tête et les viscères de la jeune femme Sonia Natalia Gallardo qui dort aujourd’hui à la morgue de Cordoba, pulvérisé les os d’un homme de vingt-quatre ans, envoyé à l’hôpital un enfant de neuf ans.
On nous dira, bien sûr, que toutes les mesures de sécurité sont prises, que le public est averti, que les cons-courants sont informés et formés, et que les accidents ne sont que « la faute à pas de chance » !
Il n’empêche : si cet infernal cortège des marchands du temple n’était pas passé par là, Sonia Natalia serait toujours vivante et ses deux compagnons de détresse seraient encore debout et en bonne santé, les animaux et insectes de la Pampa continueraient leur vie tranquille (au bénéfice vital d’une humanité qui a tendance à l’oublier !), les jeunes oiseaux ne seraient pas tués dans l’œuf par le vacarme des machines, les végétaux ne seraient pas arrachés de leur terre par les pneus crantés des 4x4 au museau de pare-buffle et des gros culs suiveurs, et la terre respirerait beaucoup, beaucoup, beaucoup mieux !
À l’heure des vélos en ville, des gesticulations de Copenhague, de la régurgitation par le Conseil Constitutionnel d’une indigeste taxe carbone, des appels lénifiants d’anciens pollueurs repentis (disent-ils !), des manipulations de conscience climatique… il serait sain de se souvenir que la survie de notre terre (à défaut de celle de notre espèce dont se contrefout l’univers) passe, avant la satisfaction de besoins artificiels et le désir de profit individuel, par le respect de notre environnement, le respect de l’autre, de tous les autres, et par le RESPECT DE LA VIE, de toutes les vies !
À bon entendeur… salut et FRATERNITÉ !

image quotidien La Voz del Interior - AFP