Du côté maternel, il est issu d’une famille de scieurs de long du fameux Val d’Ajol, aux confins de Lorraine et de Franche Comté. Quant à ses racines mâles, elles sont ancrées dans la terre de la Vôge, pays de Xertigny, un monde de laboureurs.
Parce qu’ils voulaient s’ouvrir au monde, ses grands parents avaient migré vers la vallée de la moyenne Moselle. Dogneville ! Lieu d’atterrissage idéal, en bordure de piste d’un tout jeune aérodrome ou pétaradaient les Farman, Blériot et autres machines volantes à peine identifiées qui attiraient des foules de curieux. Flairant la bonne affaire, ils avaient ouvert le Café de l’Aviation ! À leur table, les merveilleux fous volants casqués de cuir parfumés à l’huile de ricin, les rêveurs de l’air et des nuages, les futurs as de la Grande Guerre, pilotes intrépides et grands séducteurs : René Fonck, qui cumulera bientôt cent vingt-sept victoires sur des aéroplanes venus d’outre-Rhin, Georges Madon, ses cent cinq combats victorieux, Georges Guynemer qui enverra bientôt au tapis quatre-vingt-neuf Prussiens !
Heureux, les grands-parents dans ce bistro du grand air ! Tellement que leur vint bien vite un bel enfant, le petit Louis qui, passé le temps des études, deviendra saute-ruisseau pour une banque, un métier au contact d’indigestes grippe-sous qui useront sa jeunesse à l’insupportable ! Il prendra très vite la poudre d’escampette, se fera engager par la Compagnie des Chemins de fer Français, s’occupera de trains, jusqu’au jour où il endossera l’uniforme de Poilu généreusement offert par un État sûr de lui, convaincu que la guerre sera très courte et victorieuse. Sur le quai, sa voix se mêlera à celles des autres recrues persuadées que la reconquête de l’Alsace et de la Lorraine se fera sans douleurs. Entre deux couplets de La Marseillaise, on l’entendra hurler « On les aura ! On sera revenus pour Noël ! On les aura ! On les… ».
Sans douleurs !
Louis rentrera du front définitivement déchiré, meurtri, traumatisé au point d’en perdre le sommeil et le goût de la vie.
Heureusement, il connaissait Delphine ! Heureusement, il retrouva par raccroc son ancien commandant des tranchées. « Je t’aime… », lui dit l’une ! « Que faites-vous, maintenant ? », questionna l’autre. « Je t’aime aussi », répondit-il à l’une. « Rien ! », avoua-t-il à l’autre qui se souvenait de lui comme d’un bon soldat, fidèle, courageux, entreprenant. « Alors, si vous voulez, je vous engage, conclut l’ancien officier. Je suis propriétaire d’une usine dans le Nord, une briqueterie. Je cherche un directeur. Vous… peut-être ! ».
Mariage, malles, voyage en… train, installation à Proville-lès-Cambrai. Le poste plaira beaucoup à Louis. Il s’y donnera à fond, comme il se donnera tout entier aussi à sa famille. Des enfants naîtront bientôt : Marguerite sera la plus pressée, « Margot » la grande sœur, puis Pierre, le petit Pierre, Pierrot…
Pierre DIDIER !
Né là, à Proville-lès-Cambrai, le 1er mai 1929, jour de la fête du travail et de la conscience citoyenne, à deux pas trois enjambées d’un lieu de vieille paix royale, Le Cateau-Cambrésis, ville natale d’un beau peintre réformateur de la vision contemporaine : Henri Matisse.
Hasard ?
Prédestination !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire