Un hobereau perdu
Qui, hier encore, hantait les rives du pouvoir,
Convaincu de mensonge et de forfanterie,
Se trouva, un beau jour…
En passe de retour !
Eh, quoi… hurlaient les uns, il nous a tous trompés !
Alors… disaient les autres, n’avez-vous pas chez vous
Quelque autre malandrin amoureux des affaires,
Quelque baron suspect, ou quelque élu ripoux
Coupable au quotidien des pires avanies ?
D’un mur à l’autre de la Chambre,
On se jetait des mots qui ne valaient pas l’ambre,
Des noms d’oiseaux, des railleries, des invectives,
De salaces injures d’écoliers attardés.
Quand soudain la nouvelle parcourut les couloirs :
Ce hobereau perdu, par un soutien fidèle
D’électeurs trop heureux de tenir un modèle…
Recouvrait son pouvoir !
Les ennemis d’hier attachés au fauteuil,
Les Panurge, Cassandre… endormis d’un seul œil,
Pressés de l’accueillir,
Prièrent leur Conscience de savoir… en finir
Avec ses préventions !
Alors,
D’un mur à l’autre de la Chambre,
Et du sol au plafond,
Convaincus que chacun et tous comme un seul homme,
Exposés au désir de planquer grandes sommes
D’euros bien mal acquis dans un pays martyr,
Pourraient être conduit à vivre ainsi un jour…
On se tut, on ouvrit les bras, on exulta !
On le reçut !
La vie parle-ment-taire valait bien qu’on pardonne
A celui qui avait plus d’un tour dans son sac,
Et qu’on l’autorisât à présenter son cul
Au velours de la Chambre ! Il reprit son fauteuil…
Il devint exemplaire en repenti utile aux services d’Etat.
Si soumis, si docile enfin qu’un beau matin
Le Prince lui refit cadeau d’un… maroquin !
On le revit sourire aux étranges lucarnes,
Et donner des leçons de morale à ses gens
Condamnés par misère à manger de la carne !
Il avait recouvré… fortune et entregent.
De cette affaire enfin, l’Histoire fit son deuil.
On l’appelle, depuis, dans les rues du pouvoir,
Avec onction, respect,
Secouant l’encensoir…
Le cas Huzac !
Salut et Fraternité.
Image : couverture de Au plaisir d'ENA Gilles Laporte éd. DGP Québec 2001